En tant qu’investisseur responsable et pionnier dans la RSE, NCI s’engage depuis plus de 10 ans dans l’accompagnement de ses participations pour les aider au mieux à appréhender les différents défis de la transition écologique. Concrètement, en interne, cela passe par la mise à disposition de notre Pôle performances à destination des dirigeants. Nous mettons également en relation les dirigeants de nos participations qui peuvent partager leurs retours d’expérience sur leur pratique RSE. Cette collaboration permet aux entreprises de bénéficier d’expertises diversifiées et de pratiques exemplaires, enrichissant ainsi leur approche et accélérant leur progression.
Parmi eux, le groupe The Reefer Group (TRG), propriétaire du célèbre carrossier-constructeur Chéreau fait figure de référence. Le constructeur de véhicules frigorifiques normand que nous avons le plaisir d’accompagner depuis 2021 a fait de la RSE une priorité et mène depuis plusieurs années une politique très volontariste en la matière. Damien Destremau, président de TRG et Christophe Danton, directeur RSE et communication, nous livrent plus en détail la stratégie du groupe.
Anne-Cécile GUITTON, présidente de NCI
Quand avez-vous commencé à travailler sur le sujet de la RSE et quels ont été les points clés de votre parcours ?
Nous avons sérieusement investi sur la RSE avec la publication de notre premier rapport en 2021 sur l’activité 2020. Aujourd’hui, nous en sommes au quatrième et dorénavant, nous en publierons quatre : Un pour TRG et un pour chaque entité du groupe : Aubineau, Chéreau et Sor Iberica. Mais le vrai changement va avoir lieu l’année prochaine. En effet, nous sommes très honorés d’annoncer que TRG sera une entreprise à raison d’être au printemps prochain.
Damien Destremau
Tout cela a été rendu possible par la conscientisation du comité de direction, puis la mise en place de ressources à plein temps. En effet, depuis septembre 2023, Benoît Courteille, qui était l’ancien patron de la R&D de Chéreau, a pris le poste de responsable développement durable du Groupe tandis que Christophe Danton est le nouveau Directeur RSE et communication.
Quel a été leur impact ?
Concrètement, la création de notre direction RSE et communication, ainsi que la prise de poste du responsable développement durable permet de préparer le Groupe à conjuguer notre feuille de route RSE pluriannuelle avec les prérequis de la CSRD. 2024 est donc une année de préparation pour être prêts en 2025.
Damien Destremau
A titre d’exemple, nous changeons d’ERP en avril 2025 pour remplacer l’ancien SAP qui avait 20 ans. Le nouveau logiciel nous permet notamment d’aller tracer tous les CAPEX, les OPEX verts, de travailler sur le suivi des actions et la feuille de route que l’on partage maintenant avec nos actionnaires.
Christophe Danton
Quels leviers avez-vous identifié pour réduire votre empreinte ?
Nous avons conscience que 98 % de nos émissions de CO2 proviennent du Scope 3. Si on prend le scope 3 amont, c’est-à-dire tout ce qui vient des fournisseurs et le déplacement de nos collaborateurs pour venir travailler, c’est 70 000 tonnes. Il y a un enjeu fournisseur mais le levier n’est pas facile à actionner.
L’écrasante majorité des émissions de CO2 liées à notre activité provient en réalité du « scope 3 aval », c’est-à-dire de l’utilisation de nos produits par nos clients. Nous sommes entre 1,5 million et 3 millions de tonnes de CO2 à l’année. Notre véritable levier d’action se situe donc sur notre « scope 3 clients ». Nous avons là des leviers extrêmement importants puisque 98 % des semi-remorques frigorifiques utilisées en Europe utilisent du diesel.
Christophe Danton
Quelles sont vos ambitions et les moyens que vous voulez déployer ?
Notre rêve ? C’est que 100 % des véhicules livrés par Chéreau en 2030 soient électriques et contiennent notre isolation renforcée VIP (vacuum insulated panels). Cela passe par une transformation majeure pour nous avec notamment la mise place d’essieux générateurs, de panneaux solaires, de groupes 100% électriques mais également par convaincre nos clients d’investir dans ces technologies et de nous équiper en conséquence. Tout cela nécessite en effet d’embaucher entre 50 et 100 électro-mécaniciens qui sont des ressources rares.
Dans un futur idéal, nous souhaiterions que les grands acteurs de la distribution engagés dans la transition énergétique comme Carrefour, Intermarché, ou Leclerc demandent à leurs partenaires transporteurs d’acheter un véhicule CHEREAU. »
Damien Destremau
Comment inciter vos clients à investir dans des semi-remorques plus écologiques ?
Nous avons imaginé deux pistes qui nous semblent envisageables en ce sens. La première reprend le principe des Certificats d’Économie d’Énergie (CEE) que l’on retrouve pour les groupes frigorifiques. Pour bénéficier de ces certificats, il convient de se baser sur un niveau de performance et non une technologie. Le Cémafroid[1] pourrait ainsi dresser un état des lieux de la moyenne des coefficients K par type de véhicules ; tout véhicule ayant un coefficient plus performant pourrait se voir doter d’un certificat d’économie d’énergie à déterminer en fonction du gain d’énergie associé à l’écart de coefficient d’isolation.La deuxième piste, plus ambitieuse, est celle d’un super FRC. Tous les véhicules avec un coefficient K inférieur à une certaine mesure (par exemple 0,33) pourraient se voir attribuer un statut de super FRC qui pourrait être assorti d’une autorisation d’exploitation de 15 à 18 ans au lieu des 12 ans réglementaires, moyennant les contrôles périodiques déjà en vigueur.
Damien Destremau
Pouvez-vous nous partager quelques beaux résultats issus du recueil des indicateurs ?
Sur le volet environnemental, le total de déchets non valorisés produits par la société est passé de 750 kg/véhicule en 2019 à 430 kg/véhicule en 2023. Il s’agit d’un des trois indicateurs d’intéressement du personnel, ce qui renforce nécessairement l’engagement. Sur les émissions des scopes 1[1] & 2[2], le Groupe est passé de 3 231 TeqC02 en 2022 à 2 621 TeqC02 en 2023. Ces résultats ont été obtenus grâce entre autres à tout un travail d’isolation de nos bâtiments ou encore l’optimisation des chauffages. L’installation de panneaux photovoltaïques en ombrière est imminente et celle d’une chaudière biomasse est également à l’étude.
Damien Destremau
Quid du volet sociétal ?
Nous avons diffusé une enquête sociale qui a eu de très bons retours. Nous sommes sur la bonne voie, nos indicateurs sociaux s’améliorent mais il reste à faire. Par exemple, le taux de féminisation est à 12 %, avec des postes non ergonomiques liés toutefois à l’outil industriel qui est assez daté.
Damien Destremau
Avez-vous des exemples d’actions mises en place pour faciliter ou améliorer l’attractivité vis-à-vis des femmes ?
L’attractivité, c’est un de nos gros enjeux stratégiques au niveau du groupe, notamment avec les jeunes générations qui ont de nouvelles attentes. La féminisation fait bien évidemment partie de ce sujet. En premier lieu, on peut affirmer que nous sommes en réel progrès en la matière. Nous sommes passés d’un taux de féminisation de nos équipes à 3 % il y a quelques années à 12 % aujourd’hui. On peut plus facilement rencontrer des femmes dans les ateliers qu’auparavant. Cela est extrêmement bien perçu par l’ensemble des collaborateurs car cela apporte un équilibre au niveau de l’ambiance des équipes et puis une attention différente sur la qualité de la réalisation du travail.
Damien Destremau
En termes d’action, nous avons, par exemple, ouvert nos portes à un groupe de femmes avec une visite d’usine qui leur était exclusivement dédiée. Cela a été l’occasion de réaliser des interviews de collaboratrices pour susciter des envies, montrer que nos métiers, même s’ils sont parfois difficiles quand on est loin de l’industrie, sont accessibles aux femmes et qu’il y a des belles possibilités d’évolution au sein de l’entreprise.
Christophe Danton
jeudi 12 septembre 2024